ACCUEIL

BULLETIN 182
2è tr. 2008

Sommaire

Le mot du Président

Décisionq du Conseil d'Administration du 6 mars 2008- Nouveaux adhérents - Changements d'adresse - Nos joies-Nos peines.

Assemblée Générale du 29.III.2008

LES FESTIVITES DU TET ET 49è ANIVERSAIRE DE L'ALAS
   -
Le Têt à Paris
   - Aunis Saintonge
   - Montpellier
   - Nice –Côte d'Azur
   - Toulouse
   - Sorgues
   - Genève
   - Californie

Le Cercle de l'ALAS-Les Repas à Paris

Echo du Mémoire

Dossier : Les Infrastructures de transport, un enjeu majeur pour l'avenir du Vietnam

NOTES DE LECTURE
  - Aurore et Léo, Indochine France
  - Vietnam, Parcours d'une nation
  - Indochien, l'envoûtement

La double tragédie de Bahrein

ACTUELLES
  - Missions Etrangères de Paris
  - Vietnam
  - Le 87è congrès de l'Union des "A"
  - Le XIIè sommet de la Francophonie
  - Avant-projet d'escapade d'automne
  - Hommage à Roland Garros

ALASWEB
Le message du trésorier

Le courrier des lecteurs

Bon de commande "Mémoire du Lycée Albert Sarraut"

 

 

Dossier  

LES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT

UN ENJEU MAJEUR POUR L'AVENIR DU VIETNAM

 

On oublie souvent que l'Indochine a été le territoire le mieux équipé de l'empire français. Dans le domaine des infrastructures et des transports, le plan très ambitieux du gouverneur général Paul Doumer qui administra l'Indochine de 1897 à 1902 avait ouvert une ère nouvelle.

Rien n'avait été laissé au hasard dans le lancement de ses chantiers immenses que poursuivront et achèveront ses successeurs dans un contexte difficile, celui des deux guerres mondiales et de la crise économique de 1929 (1) . Rappelons à titre d'exemples l'ouverture, dès 1910, de la " ligne ferroviaire acrobatique du Yunnan" comportant 195 tunnels et 265 ponts. Le "Transindochinois" reliant Hanoï-Saïgon en 1936, après 38 ans de travaux. Ligne doublée par la route coloniale n°1 ( route Mandarine) traversant le pays de Ca Mau , au cœur de l'extrême sud de la péninsule, à Dong-Dang, poste situé à la frontière chinoise.. En 1936, un réseau ferroviaire de 3 500 Km irriguait l'ensemble du territoire. Tous les chefs-lieux de province, même de montagne, étaient reliés par un réseau de routes asphaltées en presque totalité. Les équipements d'adduction d'eau et d'électricité étaient adaptés aux besoins. La construction de centrales électriques avait été réalisée grâce au charbon des mines de Hong Gaï - Campha.

Mais ces infrastructures dont a hérité le Viêt Nam en 1975, au moment de son indépendance et de sa réunification, sont après trente années de guerre détruites pour bon nombre, gravement endommagées ou réparées à la hâte. Celles qui ont été épargnées sont vétustes. Or, leur reconstruction ainsi que leur modernisation conditionnent l'avenir du pays dans une situation économique critique, un pays confronté à la nécessité de relever de grands défis pour obtenir des soutiens financiers.

 

I.- BREF RAPPEL DES PRINCIPAUX DEFIS A RELEVER

LES DEFIS POLITIQUES

Le Viêt Nam est totalement isolé depuis l'embargo instauré par les Etats-Unis en 1975 (2) auquel s'est ajouté un boycott international, conséquence de l'occupation du Cambodge en 1979. Après l'effondrement de l'Union soviétique en 1991, il doit faire face à la rupture brutale de l'assistance du bloc soviétique, évaluée à environ 1 milliard de dollars par an.

Le gouvernement vietnamien va s'attacher, en priorité, à rompre cet isolement par une politique diplomatique active visant à faire entrer le Viêt Nam dans des zones de solidarités internationales.

Mais son régime politique le rend suspect. Les milieux d'affaires et les institutions financières internationales, notamment, doutent de ses capacités à assurer le développement du pays, ce qui constitue un grand handicap diplomatique.

Sur le plan intérieur, après le face à face d'un modèle socialiste au Nord et d'un modèle libéral au Sud, l'extension à l'ensemble du pays réunifié de la collectivisation des moyens de production gérés par un système de planification centralisé a échoué et entraîné une décennie terrible.

Une mutation idéologique s'impose. Les autorités vietnamiennes adoptent officiellement l'ouverture à l'économie de marché et à l'économie internationale, et par là même à l'initiative privée. Un véritable challenge pour un pays dorénavant partagé entre une économie de marché et un régime socialiste !

La chronologie recoupe assez bien l'évolution de la stratégie politique mise en œuvre pour obtenir les aides financières dont le Viêt Nam a un besoin impérieux pour réaliser son décollage économique.

  • En 1979, le Viêt Nam réunifié entérine l'adhésion de 1970 du Viêt Nam Sud à l'Organisation internationale de la Francophonie. Les pays en voie de développement, membres de cette organisation, bénéficient de programmes de coopération (3) et trouvent dans les pays industrialisés de la Francophonie des appuis efficaces au plan diplomatique et dans le domaine associatif (O.N.G. multipliant les échanges entre les peuples qui peuvent communiquer en français).
  • En décembre 1986, l 'abandon du modèle de l'économie planifiée est concrétisé par le lancement du "Doi Moi" (4). L'Etat vietnamien s'engage dans une "Politique du Renouveau" basée sur l'ouverture à l'économie de marché (ébauchée bien avant dans le Sud) et la réhabilitation du commerce. Des réformes très importantes sont progressivement mises en application : modernisation du système bancaire, introduction de la T.V .A., etc. On notera parmi les mesures favorisant le commerce intérieur, la suppression du "permis de déplacement" au début des années quatre-vingt dix. A partir de cette date, le commerce intérieur entre dans une phase de croissance.
  • En 1990, les relations diplomatiques du Viêt Nam avec l'Union européenne se normalisent. Un accord-cadre est signé. L'aide de l'Union européenne s'élève aux environs de 50 millions d'écus par an.
  • En 1995, moins d'un an après la levée de l'embargo américain, le Viêt Nam adhère à l'ASEAN (Association des nations de l'Asie du Sud-Est). Cette adhésion lui permet de s'insérer officiellement dans son aire géographique et, malgré son faible niveau de développement, de nouer des liens avec ses voisins et le Japon.

La frontière terrestre avec la Chine (5) est rouverte en 1997 à Lao Cai et Lang Son. On peut à nouveau se rendre de Hanoi à Kunming par la célèbre ligne du chemin de fer du Yunnan. Mais le trafic est modeste en raison de la complexité des formalités exigées. Cette même année est marquée, en nombre, par la tenue à Hanoi du VII è Sommet de la Francophonie auquel participent une cinquantaine de Chefs d'Etats et de gouvernement, dont le Président Jacques Chirac. En décembre 1998, le Vietnam conforte sa position au sein des pays membres de l'ASEAN en accueillant, à Hanoi, le sommet de cette association.

L'isolement du Viêt Nam sur la scène internationale est enfin rompu. On notera qu'au cours de cette période les concours de la Banque Mondiale et de la Banque Asiatique de développement (BAD) sont devenus effectifs. De gros efforts financiers sont décidés par les autorités vietnamiennes et consentis par l'aide internationale pour démarrer la remise en état ainsi que la construction des infrastructures de transport nécessaires au développement économique.

*- Le 1 er janvier 2007, après douze ans d'attente, le Viêt Nam devient officiellement le 150 e pays de l'O.M.C. (Organisation Mondiale du Commerce). Sa mue vers le libéralisme économique s'accélère dans un nouveau contexte, la Mondialisation.

Si le Viêt Nam a réussi un rétablissement diplomatique spectaculaire, il doit relever d'autres défis, notamment pour se doter d'infrastructures de transport en phase avec son dynamisme économique. Or, elles demeurent largement tributaires de sa configuration et de sa démographie.

 

UNE CONFIGURATION PARTICULIERE

On compare souvent le Viêt Nam à un dragon ou à une palanche soutenant à chacune de ses extrémités un panier de riz. Ces comparaisons illustrent parfaitement l'étirement extrême de ce pays dont la configuration est bien particulière dans le Sud-est asiatique où il occupe une position stratégique.

A vol d'oiseau, il y a 1650 km de distance entre les deux points extrêmes nord et sud; 600 km de distance est-ouest au Nord et 400 km au Sud, mais seulement 50 km dans la région de Quang Binh, au Centre Viêt Nam (à la frontière avec le Laos). Sa superficie totale est de 331.041 Km 2 . Elle est inférieure à celle de la province du Yunnan qui borde le pays au Nord.

De la frontière du Nord-Ouest à la partie orientale du Nam-Bo (à la hauteur de Dalat), le Viêt Nam est adossé à la cordillère de Truong Son (cordillère annamitique), difficilement franchissable. Entre ce pourtour montagneux et la mer, un long corridor comportant une multitude de petites vallées, chacune constituant "un monde à part"(6) , unit les deux deltas :

  • au Nord le delta du Fleuve Rouge (plaine du Bac-Bo) d'une superficie d'environ 15 000 Km 2 .
  • au Sud, le delta du Mékong (plaine du Nam-Bo), d'une superficie d'environ 36 000 Km 2 , le grand grenier à riz du pays.

Il convient de rappeler que les trois-quarts du territoire vietnamien sont formés de montagnes aux vallées encaissées, de hauts et moyens plateaux où vivent plus de cinquante "ethnies minoritaires" ; le quart restant est constitué par ces deux plaines deltaïques où se concentre la majeure partie de la population. Ce territoire est quadrillé de milliers de cours d'eau d'importance variée, dont le tumultueux Fleuve Rouge. Face à ses crues saisonnières, l'entretien permanent d'un réseau de 3000 km de digues est nécessaire.

On l'oublie trop souvent, le Viêt Nam est aussi un pays maritime : il compte plus de 3260 Km de côtes et un tiers de sa population vit dans les régions littorales. La plupart des trente-trois ports ne disposent que d'infrastructures rudimentaires. Les plus importants sont des ports fluviaux. Des choix sont à faire : investir deux ou trois ports en eau profonde, en consacrer certains au cabotage ? L'extension des ports de Saigon et d'Haiphong pour accueillir des navires de plus de 10 000 tonnes nécessite la construction, à l'écart des deltas, de nouvelles structures portuaires.

Ces quelques données permettent d'avoir un aperçu des défis que pose la géographie physique de ce pays "morcelé" pour mener à bien une politique d'aménagement du territoire harmonieuse, prenant bien évidemment en compte l'importance de la question démographique.

 

LE VIÊT NAM EST LE 13è PAYS LE PLUS PEUPLE DU MONDE

La population, 84,5 millions d'habitants, a une répartition très inégale. Les deltas du Fleuve Rouge et du Mékong abritent à eux seuls 42,8 % de la population alors qu'ils ne représentent que 16,6 % du territoire national. Nous l'avons vu précédemment, la bordure maritime a une forte densité humaine. Par contre, la cordillère de Truong-Son et les hauts plateaux où vit la quasi-totalité des cinquante trois ethnies minoritaires n'abritent que 3,8 % de la population, alors qu'ils occupent les deux tiers du territoire.

Le Viêt-Nam compte 95 villes ou bourgades importantes et 1 256 chefs-lieux de districts et petits bourgs constituant un réseau de villes petites et moyennes. " L'irruption de la ville, fut-elle modeste, est un phénomène historiquement nouveau. Les régions montagneuses profitent de ce développement car, bien que peu peuplées, elles connaissent aujourd'hui de très forts taux de fécondité et, surtout, elles sont alimentées par des flux externes venus des deltas. En conséquence, ces villes d'altitude connaissent actuellement un développement accéléré et se dotent d'infrastructures. Les routes de montagne ne sont toujours pas très bonnes - encore que certaines provinces montagneuses comme Son La fassent des efforts considérables pour les améliorer - mais, chose nouvelle, elles sont désormais très fréquentées. Ces bourgades opèrent la jonction entre l'Est et l'Ouest, le Delta et la montagne" (7)

Urbanisation diffuse, migrations de population (8) , 'Etat a fait de grands efforts d'infrastructures routières pour relier les centres urbains au réseau extraordinaire de petites bourgades où vivent les trois quarts de la population. La densité de la population vietnamienne, en moyenne 252 habitants/ km 2 , est six fois supérieure à la moyenne mondiale et le double de celle de la Chine. Selon les prévisions, le cap des 100 millions d'habitants devrait être franchi d'ici 15 à 20 ans.

La demande de transport déjà très forte aujourd'hui appelle un aménagement permanent du territoire prenant en compte ces données importantes.

 

II.- GRANDS TRAVAUX, REALISATIONS ET PROJETS

Depuis les années quatre-vingt-dix, grâce aux importants efforts financiers consentis par les autorités vietnamiennes et l'aide internationale, les chantiers se multiplient. La charge est lourde pour le Viêt-Nam dont toutes les infrastructures de transport sont à rénover :

  • un réseau ferroviaire de 3 000 Kms de grandes lignes comprenant sept embranchements totalisant 318.754 Km ;
  • 9 000 Km de voies fluviales ;
  • un réseau routier de plus de 105.000 Kms

Il a fallu faire des choix. La priorité a été donnée au réseau routier assurant la plupart du trafic de fret et utilisé par 90 % des voyageurs, avec pour objectifs :

  • la liaison entre les deux deltas et la plaine côtière;
  • le renforcement des liaisons entre les ports et l'intérieur des terres ;
  • les liaisons entre le Viêt-Nam, le Laos, le Cambodge et la Chine.

"On a commencé par les ponts. Les grands axes routiers, la Nationale N °1 du Nord au Sud, la route de Hanoi à Haiphong, les principaux axes du delta du Mékong sont en cours de réfection sur financement Banque asiatique de développement et Banque mondiale. Le chantier d'une nouvelle route Nord-Sud de 1676 Kms sur le tracé de la piste Ho Chi Minh, doublant l'ancienne route n°1, a été inauguré en avril 2000. Le grand pont suspendu "My Thuân" sur le fleuve Tiên reliant Ho Chi Minh ville au delta du Mékong est achevé. On pourra regretter que les chemins de fer n'aient qu'une portion congrue des crédits. Les voies fluviales qui totalisent 9000 Km , très utilisées par la batellerie traditionnelle semblent également négligées. La réfection de 100 000 Kms de routes restera à faire (9) "

Les autorités vietnamiennes ont une conscience aiguë de la nécessité de combler les déséquilibres entre le grand Sud et le reste du pays. Un programme de construction de 5 000 Kms d'autoroutes est à l'étude. Coût : 17 000 milliards d'euros environ. Pour la première phase, à l'horizon 2010, le Viêt Nam dépensera, selon les estimations, 5000 milliards d'euros. Dans ce programme sont prévues : 2 lignes transvietnamiennes, 6 autres reliant les grands centres économiques, 8 autoroutes au Sud et 4 dans le Centre et ses Hauts plateaux. Ces ouvrages permettront de rallier facilement les régions économiques de pointe, tout en donnant une forte impulsion au développement économique et touristique du Viêt Nam.

Dans le prochain Bulletin, vous trouverez la suite de ce dossier avec la présentation des projets de grands travaux concernant Hanoi (aéroport, métro, tramway…) et le Grand Saigon (terminal de Tân Son Nhât, 6 lignes de métro et 3 de tramway, une trentaine de tours de plus de 30 étages…). C'est un des bassins d'activité les plus dynamiques en Asie du Sud-Est.

L.B.

Source :"VIET-NAM. Parcours d'une nation" de Philiipe Papin

Bibliographie :

- "VIÊT NAM - PARCOURS D'UNE NATION" de Philippe PAPIN - Collection ASIE PLURIELLE de La documentation française.
-"LE VIÊT NAM FACE A L'AVENIR" de Philippe DELALANDE – Ed. L'Harmattan
-"LE COURRIER DU VIÊT NAM", n° 4160 (5 août 2007).

1- cf. le dossier du Bulletin n°138 du 2ème trimestre 1997, page 19 à 36

2- cet embargo sera maintenu jusqu'en 1994

3- Au départ, cette organisation avait pour but principal la mise en œuvre de coopérations dans les domaines de la culture, de l'éducation et du transfert de technologies. Par la suite, ces coopérations ont été élargies au domaine juridique, au développement économique et aux nouvelles technologies de l'information.

4- changer pour faire du neuf".

5-Elle avait été fermée après l'agression chinoise de 1979.

6-cf."Viêt-Nam" - Parcours d'une nation" p. 13 et 14

7- cf. "VIÊT NAM - Parcours d'une nation" p. 56 et 57

8- Au niveau national, la population urbaine représentait 27% du total national en 2005, soit une hausse d'environ 3,5% par rapport à 1999.
- A Ho Chi Minh Ville, par exemple, le nombre des migrants ne cesse d'augmenter : de 130 000 personnes par an dans les années 1980, ce chiffre a doublé, voire triplé aujourd'hui.

9-cf. "LE VIËT NAM FACE A L'AVENIR", p. 128 et 129

haut

dossier les transports