ITINERAIRE D'UN PETIT MANDARIN
De M. LE HUU THO - Editions l'Harmattan



« Itinéraire … », quel titre anodin pour conter cette véritable odyssée d'un groupe de jeunes paysans vietnamiens (« indochinois ») à travers la France par ce bel été de juin 1940.

Juin 1940 ! Il faisait très beau cet été-là ... Malheureusement il y avait la guerre, la débâcle et l'exode qui jetaient sur les routes des familles entières dans une pagaille indescriptible. Et pourtant, pour nos jeunes paysans, cette marche vers le sud avait un parfum de grandes vacances et c'était d'un cœur léger qu'ils se mêlaient à la grande cohue qui fuyait devant l'armée allemande.

Ils faisaient partie de cette M.O.I . (« Main-d'Oeuvre Indigène Coloniale de la France ») que la France avait fait venir de ses lointaines colonies pour prendre la place des jeunes français partis pour la guerre. Affectés à une poudrerie, quelque part en Normandie, toutes leurs journées se passaient à manipuler la poudre à canon qui leur minait la santé. De la France, ils n'avaient connu jusqu'ici qu'un petit coin de ciel bleu aperçu à travers quelques maigres ouvertures de leur atelier, quand ils levaient la tête pour essayer de reprendre leur souflle. Et voilà qu'un beau jour, l'encadrement composé de quelques vieux militaires "repêchés de leur profonde retraite" s'étant subitement évaporé devant l'arrivée imminente de l'ennemi, nos gaillards se retrouvèrent libres mais totalement livrés à eux-mêmes. Très naturellement, notre "petit mandarin" fut choisi pour guider la petite troupe. Lui avait été le seul à quitter volontairement une famille bourgeoise - son père était mandarin - et ses amis du lycée de Huê pour s'engager comme interprète de la M.O.I.. Il admirait la France, sa puissance et sa culture ; l'aventure l'appelait, il avait dix-neuf ans et avait lu Le Grand Maulnes !

Le décor étant posé, laissons au lecteur le plaisir d'accompagner notre sympathique troupe de paysans sous la conduite de leur "petit mandarin" dans leur pérégrination à travers la France. Il s'amusera de leur candeur (« Comment un tel pays peut-il connaître la défaite ? ») et admirera leur bon sens (« Ce pays est trop riche, trop heureux, il attire la convoitise féroce des pays voisins. D'où la cause de la guerre !» ). Il partagera leur nostalgie pour leurs familles, leurs rizières et leurs villages qui les attendaient loin là-bas, au bout du monde. Il suivra notre "petit mandarin" dans ses efforts pour s'intégrer dans ce pays pour lequel il éprouvait admiration et affection. Il le verra petit à petit gagner sa place au soleil au sein de cette société qu'il aimait, et rencontrer l'amour sous les traits d'une jeune provençale.

A travers ce récit autobiographique, l'auteur nous fait assister à une rencontre haute en couleur et authentique et entre l'Orient et l'Occident.

Vu Hoang Chau

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