LE VOYAGE D'UN PEINTRE CHINOIS EN BRETAGNE
Le 23 octobre 1992, HE YIFU quitte Kunming pour Paris. La pluie, la brume, un « gourbi » pour logement, son premier hiver dans la capitale est rude. Il pense au retour au pays natal. Son père lui avait dit au moment du départ : »Troisième fils, rentre tôt ! ». Mais l'exploration des musées et des galeries absorbe toutes ses journées, faisant entrer un peu de soleil dans sa vie de poète et de peintre en quête d'un parcours artistique.
Un matin de printemps, il part pour Rennes où l'accueille un ami d'origine bretonne, professeur de chinois, passionné par la culture de ce pays-continent. C'est une rencontre exceptionnelle à tous égards… Grâce à cet ami et à sa compagne, HE YIFU s'éprend de la Bretagne qu'il parcourt depuis sept ans. Son histoire, sa culture, les « sentiments, les us et coutumes de cette région et de ses habitants » le fascinent. Avec l'objectif d'aller plus loin, plus loin dans la perception de la nature, entre poésie et peinture, il contemple ses paysages : les marais de la Brière, Carnac, Pont-Aven, Qimper, Ouessant, Belle-Ile-en Mer… La mer, il la découvre pour la première fois de sa vie. Dans sa province natale, c'est un grand lac. Enfant, il l'imaginait au bord du lac, « la voir vraiment n'était qu'un rêve ». Or ce rêve devenu réalité, il s'acharne à la peindre. On la découvre sous tous ses aspects dans bon nombre des soixante-six tableaux qu'il présente dans un livre d'une grande beauté artistique et spirituelle publié en juillet 2003 : »Le voyage d'un peintre chinois en Bretagne ».
Généralement les livres d'art comportent une préface plus ou moins élogieuse mettant en valeur l'artiste et les qualités de son œuvre. HE YIFU fait un tout autre choix, celui d'une « lettre sans destination » datée de la fête de la clarté pure (1) 2002. En fait il s'adresse à son père, mort en 1996. Cette lettre est « sans destination » parce qu' « il n'y a plus d'endroit pour la poster ». La piété filiale inspire le « troisième fils » dans le récit de son expérience. Il en résulte un texte superbe eur sa vision de la Bretagne et la mer bretonne qui change d'une seconde à l'autre. Pour exprimer par son pinceau ce qu'il ressent, le fruit de ses méditations, il choisit les techniques traditionnelles de la peinture chinoise. " A l'extérieur, prendre pour modèle la nature, à l'intérieur, capter la source du cœur ». Ceci, écrit-il, est un des principes de création des peintres traditionnels chinois". Ceci, écrit-il, est un des principes de création des peintres traditionels chinois. Adaptés à la diversité des paysages bretons, le résultat est remarquable. Le recours de la calligraphie dans chaque tableau - puissante médiatrice entre peinture et poésie - donne un cachet très original à l'oeuvre de HE YIFU, vue par un occidental.
On connait la passion des chinois pour les inscriptions. On la découvre sur les murs des maisons, des temples, les parois des falaises, les divers objets de la vie courante. De cette coutume sont nées les "inscriptions de peinture" au XIème. Elles enrichissent les tableaux par les observation historiques, esthétiques, philosophiques. Souvent l'artiste les utilise pour en poème le choc ressenti devant la beauté d'un paysage ou ca qui le touche au fond de l'âme. HE YIFU fait partie de ces grands peintres lettrés chinois qui accompagnent leurs peintures de calligraphies originales. Dans celles de HE YIFU reviennent de temps à autre des impressions probablemment dues à son attachement à deux cultures :
"Le camélia est le symbole des montagnards de mon pays natal, de leur simplicité et hospitalité. Autrefois je le peignais très souvent pour faire l'éloge de l'esprit des gens. Hôte depuis plusieurs années de Bretagne où les camélias fleurissent une saison par an, je les considèrent comme des vieilles connaissances et leur consacre ma plume.Chaque fois que je dessine cette fleur, j'ai l'impression de converser avec mes compatriotes en toute intimité, genou contre genou".
Quel bonheur de ciontempler ce caméliz aux teintes subtiles ! Quel bonheur de partir en Bretagne grâce à ce grand livre d'art diffusé par les éditions France-Loisirs 123, boulevard de Grenelle - 75015 Paris. L.B.
1 - Le fête de la clarté pure est la fête des morts. La date varie entre le 4, 5 ou 6 avril. En 2002, elle s'est déroulée le 5 avril.

LE GOLFE DU MORBIHAN
"Le Dao n'a d'autre modéle que soi même"
LAOZI
"A l'âge de rester alité, je continue à voyager à travers mes peintures d paysage"
ZONG BING (375-443)
|