VIETNAM 2005, l'année du Coq

  Alasweb novembre 2005

C'est en raison du nouvel an lunaire vietnamien, fixé cette année au 9 février, que nous avons choisi la période de notre sixième voyage (depuis ma retraite) dans notre pays natal.

Nous n'évoquerons que quelques temps forts, notre séjour d'un mois ayant été très riche de rencontres et de découvertes.

2005, c'est l'année du coq… pas forcément du coq gaulois… mais de l'un des symboles populaires du Vietnam. Ses caractéristiques, on les retrouve dans les civilisations aussi bien occidentales qu'orientales ; en voici quelques-unes des vertus : « Les grecs anciens l'avaient consacré dieu de la médecine à cause de sa vitalité remarquable. Dans la Bible il est reconnu pour son intelligence, sa clairvoyance. En Egypte le coq était censé guider l'homme sur le chemin de la connaissance. Plus proches de nous, les Fables de La Fontaine font une large place à la malice du coq qui parvient à se libérer du Renard. Les contes populaires des diverses régions de France mettent en lumière son astuce et sa prudence ».

Ayant fêté le Têt à Hanoi en 2001, nous avons commencé cette fois-ci notre périple par le sud en atterrissant à Saigon (vol Air-France sans escale).

Quelques jours avant le Têt, nous nous promenons avec nos amis, jeune couple de médecins et leurs deux filles, en fin d'après-midi (les 35° l'exigeant), dans le centre de Saigon en fête, où l'immense avenue centrale est couverte de décorations florales en relation avec l'année du coq : un coq, une poule et des poussins « géants » en paille, des reconstitutions diverses de scènes de la campagne (rizières, paillotes, étangs, crapauds, poissons, filet de pêche, outils, hamacs et d'immenses parterres de fleurs de toutes couleurs). Nous n'avons jamais vu pareilles décorations, pleines d'imagination et de très bon goût. Il y a foule partout à pieds, à motos, des gens de tous âges, chacun photographiant à qui mieux mieux.

La veille du Têt, nos amis nous invitent chez eux à un dîner traditionnel de jour de l'an, très gastronomique. Puis, à minuit, les cloches de l'église proche sonnent à toute volée ; un feu d'artifice jaillit dans le ciel le long de la Rivière de Saigon, saluant l'année nouvelle. De retour à notre hôtel, le personnel nous invite à boire avec eux : l'alcool de riz, du « whisky vietnamien » nous disent-ils en riant ! Le manager de l'hôtel arrive, congratule tout le monde et offre à chacun (nous compris) des « lucky money » (10 000 dongs chacun) dans les petites enveloppes rouges et or traditionnelles.

Au cours de notre séjour à Saigon, nous avons notamment rencontré notre filleul de 14ans. Notre parrainage consiste à financer sa scolarité que ses parents très âgés et très pauvres ne peuvent pas assurer. Aider un tel enfant intelligent, mûr, brillant (il veut être médecin), nous considérons cela non pas comme une « bonne action » mais comme la simple justice, éviter un « gâchis ». Nos amies religieuses vietnamiennes qui gèrent ces parrainages en relation avec une Association toulonnaise, assurent le suivi scolaire des enfants et tiennent informés les parrains.

Après Saigon, nous nous envolons pour Danang (anciennement Tourane) où nous attend un autre couple ami de médecins ; accueil chaleureux, dîner familial, puis arrivée à l'hôtel choisi par eux : de notre chambre, nous découvrons une vue magnifique sur l'un des ponts illuminés qui enjambent la rivière. Le lendemain, visite de la ville, du musée cham, de la « Montagne de marbre » et d'une très belle plage, sans négliger les spécialités culinaires locales.

De Danang, un taxi nous conduit à Hoi An, à 36 km ; nous avions réservé de France, par e-mail, une chambre dans un hôtel récent : de notre petit balcon, vue plongeante sur la piscine, son petit pont et ses fresques ; très bel hôtel de style sino-vietnamien ; le tarif : 25 USD, soit 17,5 € la nuit, taxes et petit déjeuner inclus !
Hoi An est une charmante petite ville très ancienne épargnée par la guerre et classée par l'Unesco au patrimoine mondial. On peut y admirer quelques magnifiques demeures de grands bourgeois et commerçants chinois, restaurées avec goût et décorées de meubles de style ancien. C'est à Hoi An que débarquèrent les premiers marins et missionnaires portugais, puis les Jésuites ; parmi eux, Alexandre de Rhodes qui inventa l'alphabet vietnamien à partir de l'alphabet romain.

Via le fameux « Col des Nuages » …sans nuages ce jour-là, nous rejoignons Hué en voiture. Nous allons saluer l'archevêque du lieu que nous connaissions depuis 1992, puis nous nous rendons au sanctuaire marial de La Vang à 60 km : en 1798, des catholiques vietnamiens, fuyant la persécution, se réfugient dans la forêt où la Vierge Marie leur apparut plusieurs fois. Depuis, des pèlerins de tout le pays s'y rendent nombreux en pèlerinage.
Au cours de nos trois jours à Hué, visite de la célèbre « Pagode de la Vieille Dame Céleste », du marché, de la vieille ville et promenade sur la mythique « Rivière des Parfums ». La gastronomie de Hué est particulièrement fine et réputée à juste titre.

Envol pour Hanoi où nous attend mon camarade vietnamien du Lycée français de l'époque. Il nous conduit à notre hôtel non loin du petit lac Ho Hoan Kiem, donc central. Notre chambre : une suite avec balcon, climatisation, réfrigérateur, petit déjeuner, le tout pour 45 USD, soit 31,5 € !
Trois temps forts dans cette belle ville :
Accompagnés d'amies religieuses, nous rencontrons chez lui un autre filleul, 5 ans ; nous découvrons les incroyables conditions dans lesquelles vit cette famille : une seule pièce, sans fenêtres, donnant sur un long couloir sombre, humide ; le père handicapé et sans aide ne travaille pas, la mère fait « vivre » la famille en vendant des bonbons et du thé dans la rue ; tout cela à 500 m de l'hôtel Hilton, l'un des plus luxueux de Hanoi !

Dans un autre registre, la visite en taxi du nouvel Hanoi, à la périphérie de la ville, toujours grâce à mon camarade de lycée ; nous sommes fascinés par la découverte d'un réseau routier de qualité, avec des ponts nouveaux ou en projet (bientôt 8 sur le Fleuve Rouge), un boom immobilier, villas et appartements, à l'initiative des pouvoirs publics, afin de reloger les habitants de quartiers vétustes destinés à la démolition. Quartiers nouveaux avec larges avenues, espaces verts et commerces.
Au centre ville, nombreuses sont les constructions nouvelles : maisons individuelles, magasins d'Etat, coquettes boutiques, hôtels, restaurants.
Le développement économique est manifeste dans le pays ; une classe moyenne apparaît ; nous avons rencontré de nombreux touristes vietnamiens. Ce développement profite aussi un peu aux pauvres, qui sont un peu moins pauvres grâce notamment aux petits boulots induits.
Mais la richesse est toujours mal répartie comme dans d'autres pays en voie de développement.

Autre temps fort : notre visite éclair à Langson, à 150 km au nord-est de Hanoi, à la frontière chinoise. Nous nous y étions déjà rendus en 2001, mais notre motivation cette fois-ci était de découvrir la nouvelle cathédrale construite à l'initiative du jeune évêque, Mgr Kiet, notre ami rencontré en France en 1995. Construction superbe, de style sino-vietnamien, inaugurée en 2004, pour laquelle il a fallu évidemment attendre patiemment l'autorisation des pouvoirs politiques.

Cette cathédrale, véritable pagode sur le plan architectural, manifeste le souci d'inculturation de l'Eglise vietnamienne ; les détails intérieurs et extérieurs reprennent des symboles des ethnies de la région.
Cet édifice vaut le détour, d'autant plus que les paysages montagneux à l'approche de Langson sont splendides, comme ceux de Guilin dans le sud de la Chine.

Le marché de Langson est envahi par les marchandises chinoises ; la frontière est à 2 kilomètres. On y achète de tout et l'affluence est impressionnante. Introuvable à Hanoi, nous avons acheté pour notre petit filleul un ravissant jouet, petit musicien chinois jouant d'un instrument à une corde (avec le son bien sûr) et accompagnant son jeu de gracieux mouvements des bras et de la tête.

Quid de la situation politique et religieuse ?
Le régime politique n'a pas changé, c'est toujours le marxisme-léninisme et la pensée d'Ho Chi Minh, le parti unique, le délit d'opinion. La presse est sous contrôle.
Le boom économique (tourisme, investissements industriels…) et les pressions internationales sont à l'origine de davantage de liberté de circulation et d'échange.
Mais il y a des problèmes sur les hauts plateaux du centre où les ethnies se rebellent contre le joug des autorités. Au cours de notre séjour il était vivement déconseillé de s'y rendre. Des touristes entêtés ont connu la détention pendant quelques heures avant d'être expulsés de la région.

Le Vietnam est néanmoins le pays le plus sécurisé. La grippe aviaire est maîtrisée ; quelques précautions sont à prendre, c'est tout.

Quant aux relations entre l'Eglise catholique (minoritaire : 7%), et les bouddhistes (majoritaires 55%) d'une part et les autorités politiques d'autre part, elles s'améliorent. Mais tout ce qui concerne les aspects apostoliques des religions reste sous haute surveillance et le régime des permissions à demander sans cesse et des lenteurs volontaires persiste. Il y a encore des religieux en prison à cause de leurs convictions.
Il n'y a pas de liberté religieuse telle que nous la connaissons en Occident.

Pour conclure, voyage merveilleux par la beauté des sites, l'accueil chaleureux, l'attention, la générosité de nos amis vietnamiens ; nous avons été reçus et accompagnés comme des parents.
Nous n'oublions pas la bouleversante réalité de la pauvreté que les voyageurs en « tour operator » ne peuvent pas voir.

Perhaps the last, but not the least !

Jean-Claude MORILLEAU

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